La Belgique manque de mesures contre la discrimination
Les lois antidiscrimination et la loi relative au bien-être prévoient à partir du 1er juin 2023 une meilleure protection contre les mesures préjudiciables que les employeurs prendraient à l’égard des travailleurs qui invoquent cette législation.
Ces adaptations s’imposent après une procédure d’infraction intentée par la Commission européenne et un arrêt de la Cour européenne de Justice constatant que la Belgique n’a pas transposé correctement les directives antidiscrimination européennes.
Les directives antidiscrimination européennes ont pour but de protéger les personnes contre tout traitement préjudiciable ou toute conséquence préjudiciable en réaction à une plainte ou à une procédure visant à faire respecter le principe du traitement équitable. Par mesures préjudiciables, nous entendons notamment :
- la cessation de la relation de travail ;
- la modification unilatérale des conditions de travail ; et
- la mesure préjudiciable prise après la fin de la relation de travail.
La vaste protection européenne ne se retrouvait pas dans les lois antidiscrimination belges. De plus, les lois antidiscrimination définissaient la plainte de manière trop restrictive.
La loi relative au bien-être contenait également une protection similaire contre les mesures préjudiciables telles que prévues dans les lois antidiscrimination. Ici aussi, des adaptations étaient dès lors nécessaires.
Modifications à partir du 1er juin 2023
Afin de conformer cette protection juridique aux directives antidiscrimination européennes, le législateur apporte à présent les modifications suivantes aux lois belges sur la discrimination :
- élargissement du champ d’application ;
- suppression des exigences de forme pour la protection du témoin ;
- adaptation du début du délai de protection ;
- adaptation du régime de réintégration afin que la victime ne doive plus obligatoirement introduire une demande de réintégration ;
- confirmation expresse de la possibilité de cumul des indemnisations :
- introduction d'une disposition anti-abus.
Protection en cas de signalement ou d’action en justice et son contenu
Le champ d’application de la protection contre les mesures préjudiciables dans les lois antidiscrimination se compose désormais :
- de l’introduction d’une plainte ;
- de l’exécution d’un signalement ;
- de l’introduction d’une action en justice ; ou
- du contenu de la plainte, du signalement ou de l’action en justice.
La loi relative au bien-être contient désormais aussi le contenu de la demande d’intervention psychosociale formelle comme motif de protection.
Extension des travailleurs protégés : les témoins informels de discrimination sont également protégés
Dans les lois antidiscrimination, la protection contre les mesures préjudiciables s’applique désormais également aux personnes qui :
- interviennent en tant que témoin ou ont fait un signalement ou déposé une plainte en faveur de la victime. Les anciennes exigences de forme ont disparu ;
- conseillent, aident ou assistent la victime ;
- invoquent la violation de la loi ;
- estiment être victimes de faits de violence ou de harcèlement moral au travail liés à un motif de discrimination ou de harcèlement sexuel au travail.
Début du délai de protection
Le début des délais de protection dans lesquels la protection s’applique change dans les lois antidiscrimination du moment du dépôt de la plainte au moment où l’employeur prend connaissance ou aurait raisonnablement pu avoir connaissance du signalement, de la plainte ou de l’action en justice.
Dans la loi relative au bien-être, cela passe du moment de l’introduction de la demande d’intervention psychosociale formelle au moment où l’employeur prend connaissance ou aurait raisonnablement pu avoir connaissance de la demande, de la plainte ou du témoignage.
Pas de demande de réintégration obligatoire
Dans les lois antidiscrimination, la victime n’est plus obligée d’introduire une demande de réintégration. Ce n’était pas une obligation dans la loi relative au bien-être.
Cumul des indemnisations
Tant les lois antidiscrimination que la loi relative au bien-être prévoient à présent expressément la possibilité de cumulerl’indemnisation des mesures préjudiciables avec :
- l’indemnisation à la suite de la discrimination proprement dite ;
- l’indemnisation en réparation du dommage matériel et moral pour cause de violence ou de harcèlement moral ou sexuel au travail.
Disposition anti-abus
Enfin, une disposition anti-abus est reprise dans les lois antidiscrimination et la loi relative au bien-être. Un travailleur qui abuse de la procédure ne bénéficie d’aucune protection contre les mesures préjudiciables. Il risque même de devoir payer une indemnité.
Qu'est-ce que cela signifie pour l'employeur?
Dans le passé également, les employeurs ne pouvaient pas prendre de mesures préjudiciables à l’égard des travailleurs qui avaient introduit une plainte relative à une discrimination ou à un comportement inapproprié.
La protection est à présent étendue :
- davantage de faits entrent en ligne de compte : pensez ici au contenu de la plainte, du signalement ou de l’action en justice ;
- plus de personnes intervenant pour la victime sont protégées car les exigences de forme disparaissent.
Les travailleurs ne sont plus obligés de demander leur réintégration. Cette condition pour obtenir une indemnisation disparaît donc.
En outre, la législation précise que l’indemnisation résultant de la mesure préjudiciable peut être cumulée avec l’indemnisation résultant de la discrimination proprement dite.