La Cour de cassation s’est récemment prononcée sur l’indemnisation d’un service de garde qui constitue également du temps de travail.
Le service de garde peut aussi être du temps de travail
Dans l’affaire jugée par la Cour, un travailleur effectuait des services de garde. Le travailleur ne devait pas séjourner à un endroit spécifique, mais sa liberté de mouvement était tout de même considérablement limitée, en raison du délai très court dans lequel il était censé reprendre le travail après un appel.
Comme les contraintes imposées au travailleur étaient de nature telle qu'elles affectaient objectivement et significativement la faculté pour ce dernier de gérer librement son temps libre, ce temps d’attente constitue également du temps de travail. Cela signifie que le temps entre en ligne de compte pour le calcul des limites maximales de la durée du travail journalière et hebdomadaire.
Par ce jugement, la Cour de cassation confirme la jurisprudence européenne en vigueur de la Cour de justice.
Temps de travail et rémunération
Le simple fait que le service de garde constitue du temps de travail (être à la disposition de l’employeur) ne signifie pas automatiquement que le travailleur a un droit de principe au salaire.
La réglementation belge en matière de durée du travail règle l’exécution du travail et non le droit à une rémunération. Dès lors, elle ne contient aucune obligation de rémunération ou d’indemnisation de la durée du travail, sauf en ce qui concerne le droit au sursalaire.
Il existe donc une distinction importante entre le travail qui est déterminant pour
- le calcul de la durée du travail d’une part et
- le droit à une rémunération, d’autre part
La jurisprudence de cassation décrit la notion de « rémunération » comme la compensation pour le travail qui est effectué en exécution d’un contrat de travail. Sauf disposition contraire, légale ou contractuelle, le travailleur ne peut pas prétendre à une rémunération pour la période pendant laquelle il n’effectue pas de travail effectif.
Il n’en ressort donc pas que lorsqu’une période est considérée comme du temps de travail, un salaire est automatiquement dû.
Indemnisation d’un service de garde
Dans l’arrêt dont nous discutons ici, la Cour s’est également prononcée sur l’indemnisation du service de garde.
La rémunération est la contrepartie pour le travail effectué par un travailleur en exécution du contrat de travail. L’obligation de l’employeur de payer une rémunération est la conséquence nécessaire de l’exécution du contrat de travail.
Dans le cas soumis, le juge du fond (Cour du travail de Mons) avait déjà qualifié le service de garde du travailleur de prestation de travail en exécution du contrat de travail. Cette qualification n’a pas été contestée devant la Cour de cassation.
Les prestations de travail d’un autre type effectuées par un travailleur en exécution du contrat de travail peuvent être rémunérées différemment. Il est donc possible de prévoir une autre indemnisation pour une période pendant laquelle le travailleur « attend », même si ce temps d’attente est du temps de travail.
Mais, comme l’a décidé la Cour de cassation, si le salaire horaire convenu ne fait pas de distinction selon le type de prestation de travail, ce salaire horaire est également dû pour le service de garde qui est à la fois du temps de travail et une prestation de travail en exécution du contrat de travail.
Le raisonnement de l’employeur dans cette affaire, selon lequel un service de garde ne donne droit qu’à une rémunération (quelconque) à condition que cela soit expressément convenu ou réglé de cette manière, est incorrect.
Quelles sont les implications pour l’employeur ?
Il est préférable que les employeurs qui font prester des services de garde à des travailleurs concluent des accords concernant l’indemnisation de ces services de garde. Pour un service de garde, il est possible d’octroyer une autre indemnisation que pour des prestations de travail ordinaires, même si le service de garde constitue du temps de travail et qu’il s’agit simultanément d’une prestation de travail en exécution du contrat de travail.
L’employeur doit toujours vérifier s’il n’existe pas une source de droit supérieure contenant des règles à respecter à ce sujet, par exemple une CCT sectorielle. Certains secteurs ont conclu une CCT sur l’indemnisation des temps d’attente, comme le secteur des entreprises de garage (CP 112) et le secteur des pompes funèbres (CP 320).